Les créances douteuses représentent les prêts pour lesquels le risque de non-remboursement est jugé très élevé. Cette proportion, qui dépasse largement le seuil de tolérance habituel, signale un alourdissement majeur du risque bancaire dans le pays et, par ricochet, dans l’ensemble de la zone CEMAC.
Un frein au financement de l’économie
Cette situation limite directement la capacité des établissements financiers locaux à jouer pleinement leur rôle de soutien à l’économie réelle. Une accumulation de prêts non performants contraint les banques à provisionner davantage, réduisant ainsi leurs marges et leur appétit pour l’octroi de nouveaux crédits aux ménages et aux entreprises.
La BEAC identifie l’origine de cette fragilité dans des facteurs structurels de l’économie gabonaise. Ces facteurs incluent une dépendance marquée au secteur public, qui est souvent source de retards de paiement importants. On note également le manque de diversification économique, exposant l’activité aux chocs externes, et l’insuffisance de garanties solides dans l’élaboration de nombreux dossiers de crédit.
Les répercussions sur le secteur privé gabonais
Pour le secteur privé, ces chiffres sont particulièrement préoccupants. La montée du risque bancaire se traduit par un resserrement automatique des conditions d’accès au crédit. Les entreprises, notamment les PME qui dépendent souvent des financements bancaires pour leur croissance ou leur fonds de roulement, se trouvent face à des exigences de garanties plus strictes et des taux d’intérêt potentiellement plus élevés.
Ce rétrécissement du robinet du crédit risque d’asphyxier l’investissement productif. Les projets d’expansion, d’innovation ou de création d’emplois peuvent être reportés ou annulés, affaiblissant ainsi les efforts de relance et de diversification en dehors du secteur pétrolier. L’incapacité à obtenir des financements suffisants peut également exacerber les problèmes de trésorerie déjà rencontrés par les entreprises affectées par les retards de paiement de l’administration.
Une alerte lancée en marge d’une visite officielle
Cette mise en garde intervient dans un contexte diplomatique et financier de haut niveau. Le gouverneur de la BEAC, Yvon Sana Bangui, a entamé un séjour au Gabon dans le cadre d’une série d’activités menées par l’institution financière.
Le 12 décembre, le gouverneur a notamment été reçu en audience par le président de la République, Brice Clotaire Oligui Nguema, au Palais Rénovation. Il est fort probable que cette rencontre ait été l’occasion d’aborder directement le thème de la dégradation de la qualité des crédits et la nécessité d’une réponse politique ferme.
Appel à la transparence et à la discipline
Face à ce constat alarmant, la BEAC lance un appel pressant au gouvernement. Pour inverser cette tendance dangereuse, l’institution monétaire recommande l’adoption rapide de mesures correctives ciblées.
Elle insiste particulièrement sur la nécessité de renforcer la discipline budgétaire de l’État et d’améliorer la transparence des finances publiques. Simultanément, les banques elles-mêmes sont appelées à une meilleure évaluation des risques de crédit.
L’enjeu est de taille : sans ces correctifs rapides, la persistance d’un tel niveau de créances douteuses pourrait compromettre les efforts de relance économique du Gabon en bridant l’octroi de crédits, risquant ainsi de ralentir l’investissement et la consommation.










