Si, après le coup d’État du 30 août 2023, la mise en place d’une commission vérité, justice et réconciliation pour les violences post-électorales de 2016 (notamment l’attaque du QG de l’opposant Jean Ping) a quand même été évoquée lors du “dialogue inclusif” d’Agondjé, les questions sur la nationalité d’Ali Bongo, également sujettes à débat pendant les deux mandats du président déchu, semblent tomber aux oubliettes. Pourtant, pour la vérité historique et face à la question non réglée du partage de la colossale fortune héritée d’Omar Bongo entre ses enfants, la question des origines gabonaises d’Ali Bongo pourrait refaire surface avec acuité. Ce débat, qui a agité le pays dès 2014 et avait été étouffé, réclame aujourd’hui la vérité historique.
Ali Bongo, qui a dirigé le Gabon de 2009 à 2023 avant d’être renversé, est-il le fils biologique d’Omar Bongo ? Ou est-il l’un des milliers d’enfants biafrais évacués au Gabon après la guerre du Biafra au Nigéria dans les années 1960 et 1970, avant d’être adopté par le couple présidentiel, Omar Bongo et Joséphine-Marie Nkama ? Officiellement, Ali Bongo, né Alain-Bernard Bongo, est né le 9 février 1959 à Brazzaville, par césarienne.1
Un livre, étincelle d’une controverse nationale
C’est le livre de Pierre Péan, “Affaires africaines”, qui a allumé la mèche, déclenchant un bras de fer politico-institutionnel entre Ali Bongo et ses adversaires. L’opposition y a trouvé une faille, le soupçonnant de ne pas être né Gabonais et, par conséquent, de ne pas pouvoir exercer le pouvoir, conformément à l’article 10 de la Constitution de l’époque.
À un mois de la présidentielle de 2016, l’Union Nationale avait déposé 1 500 plaintes auprès de la Commission électorale nationale et permanente, tandis que le Mouvement Héritage et Modernité en avait déposé 1 100. Alexandre Barro Chambrier, alors président du Mouvement Héritage et Modernité, avait déclaré : « Monsieur Ali Bongo Ondimba a estimé en 2009 qu’il avait produit un faux acte de naissance. A-t-il présenté ce même acte de naissance, ou a-t-il présenté un autre acte de naissance ? Nous ne pourrions cautionner une situation d’un personnage qui serait à la tête de l’État sans remplir les conditions. »
Des documents de candidature toujours en question
Aujourd’hui, alors que la “chape de plomb” est levée, la question demeure cruciale : avec quel acte de naissance Ali Bongo a-t-il complété son dossier de candidature aux présidentielles de 2016 puis de 2023 ? A-t-il, comme en 2009, présenté un acte d’état civil établi par Serge Williams Akassaga, alors maire du 3e arrondissement de Libreville, alors que ce dernier n’avait pas le droit d’établir un tel acte ? Ou, au contraire, le président déchu a-t-il fourni un extrait informatique de son acte de naissance nantais, sans éléments concrets prouvant sa filiation avec Omar Bongo ?
Malgré les plaintes et requêtes déposées auprès de la Cour constitutionnelle, ainsi que les plaintes pour faux en écritures introduites par l’opposition et la société civile, Ali Bongo n’a jamais été inquiété, que ce soit par un recours devant la Cour constitutionnelle ou par la justice.
L’heure de la vérité sur l’héritage ?
Désormais évincé du pouvoir, les langues vont-elles enfin se délier pour faire éclater la vérité sur les mystères entourant les origines d’Ali Bongo ? Cette question est d’autant plus importante aujourd’hui que la répartition de l’héritage de la fortune d’Omar Bongo est toujours en suspens. Ses enfants, plus d’une cinquantaine, pourraient exiger un test d’ADN, d’autant plus qu’Ali Bongo et sa famille se seraient accaparés une bonne partie de la fortune d’Omar Bongo depuis 2009.