En effet, lors d’une séance plénière à l’Assemblée nationale le 27 juin 2025, haro par le ministre du Pétrole sur les mesures prises pour éviter de nouveaux drames et l’indemnisation des familles des victimes, mais exit les poursuites judiciaires. Si Sosthène Nguema Nguema a détaillé les mesures prises pour éviter qu’un tel accident ne se reproduise et a affirmé que les familles des victimes avaient été indemnisées, il n’en demeure pas moins que Perenco s’en sort sans poursuite judiciaire. Le ministère public n’engagera pas de poursuites judiciaires, pas de procès pénal, malgré les infractions graves et répétitives de Perenco. C’est d’autant plus préoccupant que l’accident de la Becuna est considéré comme le plus meurtrier jamais enregistré en Afrique, et qu’il aurait pu être évité par la direction de Perenco.
Car, de l’aveu même du ministre du Pétrole, le non-respect de la procédure de contrôle de puits, l’utilisation de matériel non conforme ou inadapté, ainsi que la présence de personnel sans qualification pour le poste occupé ou non-expérimenté, constatés à l’issue d’une enquête conduite par une équipe de la Direction générale des hydrocarbures sur les lieux du drame, conjointement avec le Parquet de la République de Port-Gentil, pour déterminer les causes de l’accident, sont à l’origine de l’explosion.
Des propos qui confortent donc le rapport de l’ONG Environmental Investigation Agency US (EIA), dévoilé le 21 mai 2025 et qui met en lumière des faits accablants, basés sur de nombreux témoignages d’anonymes et de lanceurs d’alerte, qui mettent en cause des décisions managériales sacrifiant la sécurité à la production à tout prix et une gestion néocoloniale de la main-d’œuvre locale.
Combien de fois encore, Perenco va-t-elle continuer à échapper à la justice gabonaise, malgré de nombreux accidents enregistrés ? Au lendemain de l’explosion, le directeur général, Adrien Broche, son adjoint, Nestor Awaurhet, et le manager workover, Augustin de Lapasse, avaient été arrêtés avant d’être relâchés, suite à de multiples pressions. Par la suite, le parquet général avait suspendu le magistrat en charge de l’enquête à l’époque, pour insubordination et violation du principe d’hiérarchisation.
Avant l’explosion de la plateforme Becuna, Perenco avait déjà enregistré une série noire d’accidents graves, malgré ses multiples promesses de revoir ses normes de sécurité. Par exemple, en avril 2022, au terminal pétrolier du Cap Lopez, le plus grand du pays, une fuite massive de cinquante mille mètres cubes de pétrole brut s’était répandue, souillant une zone équivalente à trois terrains de football. Un rapport de l’ONG Croissance Saine Environnement avait alors pointé du doigt une possible négligence de la part de Perenco, suggérant que l’accident aurait pu être évité. Un bis repetita s’est produit en avril 2025 : une nouvelle fuite de pétrole a été signalée, cette fois sur le pipeline Coucal-Rabi, près de Port-Gentil.
À défaut de poursuites judiciaires, l’annonce du ministre du Pétrole, Sosthène Nguema Nguema, concernant les mesures prises pour éviter de nouveaux drames, sonne-t-elle enfin, espérons-le, la fin de la série noire pour Perenco au profit de la sauvegarde de vies humaines et de la protection de notre environnement ?