Pendant près de six décennies, sous le règne d’Omar Bongo Ondimba puis de son fils Ali Bongo l’Islam occupait une place de choix, souvent perçue comme un instrument de pouvoir. À cette époque, les conversions par opportunisme n’étaient pas rares car se tourner vers La Mecque était, pour certains, le moyen le plus sûr de s’attirer les grâces du Palais Rénovation. Mais depuis la chute du régime, le décor a changé. L’Islam, autrefois omniprésent, semble s’être éclipsé au profit d’une foi chrétienne décomplexée, portée par une Église catholique retrouvée et des églises de Réveil de plus en plus influentes.
Cette mutation ne passe pas inaperçue et suscite l’inquiétude de plusieurs observateurs de la vie publique. Le constat est frappant puisque des cultes improvisés, des bénédictions et des prédications s’invitent désormais au cœur des administrations publiques. On observe notamment des scènes surréalistes dans certaines mairies où l’officier d’état civil entre en scène au son des louanges. Tout porte à croire que la laïcité est purement et simplement effacée des usages officiels.
Si cette ferveur chrétienne ne semble pas heurter la majorité de la population pour l’heure, elle pointe du doigt une tolérance à géométrie variable. Ces actes ne semblent pas gêner tant qu’ils ne sont pas orchestrés par des bwitistes, des francs-maçons ou des musulmans. Pourtant, le risque est réel qu’un jour, un citoyen exprime son ras-le-bol et demande la même visibilité pour d’autres rites, comme faire danser des bwitistes dans le hall d’une administration en guise d’action de grâces. Cette réflexion s’impose d’autant plus que le mélange des genres était déjà critiqué sous l’ancien régime lorsque Islam et République semblaient se confondre.
Face à cette dérive apparente, deux options majeures s’offrent désormais au pays. Il paraît nécessaire d’insérer dans les écoles de formation des fonctionnaires un cours sur la laïcité à laquelle les agents sont assujettis. Dans le cas contraire, il serait préférable que la Constitution soit révisée et que le pays renonce avec sincérité à la laïcité.










