Aujourd’hui, la Chine capte plus de 90 % de la transformation mondiale du manganèse. Grâce à une énergie abondante et bon marché, un tissu industriel intégré et des politiques fiscales ultra-compétitives, le pays importe massivement du minerai brut, notamment depuis l’Afrique, pour produire des alliages destinés à l’industrie de l’acier et aux batteries. Comment contrer cette domination chinoise qui pèse sur les marges des producteurs africains ?
En Australie, premier exportateur mondial de minerai de manganèse, la stratégie est tout autre : le pays se concentre sur l’extraction et l’exportation brute. Peu de projets de transformation locale ont vu le jour, la compétitivité énergétique étant insuffisante face à la Chine. Même constat en Afrique du Sud, troisième acteur du marché : malgré des décennies d’expérience minière, les capacités locales de transformation restent limitées, freinées par les coûts et l’instabilité du réseau électrique.
Dans ce contexte, le Gabon cherche à bâtir un modèle plus intégré. Actuellement, seules les installations de Moanda permettent de transformer localement environ 1,2 million de tonnes par an, soit 17 % de la production nationale. Mais pour monter en puissance, le pays devra résoudre plusieurs défis structurels : renforcer son réseau énergétique, désengorger le chemin de fer transgabonais, et proposer un cadre fiscal attractif pour attirer les investissements, estimés entre 200 et 400 millions d’euros par unité de transformation. Le pays parviendra-t-il à attirer ces capitaux dans un environnement mondial sous forte pression ?
Reste une carte que le Gabon peut jouer : la stabilité politique et l’ambition affichée d’inscrire cette transformation dans une stratégie industrielle nationale. Si les conditions sont réunies, le pays pourrait devenir le premier en Afrique à structurer une véritable filière locale de transformation du manganèse, capable de rivaliser, à terme, avec les modèles dominants. Mais le chemin est encore long face à la puissance de frappe chinoise.