Le 2 juin dernier, les populations de Plaine-Orety ont assisté, impuissantes, à la démolition de leurs habitations par les bulldozers du Génie militaire, sous la protection d’un important cordon de sécurité. Cet événement a provoqué un choc profond dans un pays habitué au laxisme et au laisser-faire.
« C’est précisément parce qu’il a été plébiscité par plus de 94,% des voix que le président peut se permettre ce type d’action. Mieux vaut déplaire en début de mandat et reconquérir le cœur des électeurs avec des promesses tenues à la fin de son mandat, n’est-ce pas ? Allez faire un tour à Cotonou : la ville a complètement changé de visage avec l’arrivée de Patrice Talon, qui a dû procéder à des déguerpissements et des démolitions pour moderniser la capitale béninoise. Aujourd’hui, les Béninois sont fiers de leur capitale », nous confie un haut cadre de l’administration, justifiant la fermeté présidentielle.
L’exemple d’autres capitales africaines
Le Gabon n’est pas le seul pays africain à adopter une telle politique. Avant lui, le Bénin et le Rwanda ont déjà emprunté cette voie.
Le 4 janvier 2017, les pelles mécaniques entraient en action à Cotonou. L’ultimatum du régime de Patrice Talon pour libérer volontairement les espaces publics dans les huit plus grandes villes du pays avait expiré. Huit ans plus tard, Cotonou se dote d’une cité administrative impressionnante : dix bâtiments de type R+5, totalisant 60 000 m² de bureaux pour les ministres, leurs cabinets et les services centraux. La cité comprend également un espace vert, un bloc R+5 dédié à la restauration et un parking d’une capacité d’au moins 500 véhicules.
Kigali, quant à elle, est souvent citée comme l’une des capitales africaines les plus propres et les plus sûres. Cependant, sa métamorphose s’est opérée au détriment des populations les plus modestes. En 2017, la capitale rwandaise a connu une transformation majeure dans le cadre de « Vision 2050 », le programme du président Paul Kagame visant à hisser le Rwanda au rang de pays riche. Ces dernières années ont vu l’ouverture d’hôtels cinq étoiles, d’un centre de conférence de 270 millions d’euros et de zones économiques spéciales. Un nouvel aéroport, d’un coût de 1,15 milliard d’euros, est opérationnel depuis 2024 avec une capacité initiale de 7 millions de passagers par an. Une deuxième phase, prévue pour 2032, doublera cette capacité à 14 millions de passagers. Ce projet, estimé à près de 2 milliards de dollars, vise à faire du Rwanda un hub aérien majeur en Afrique de l’Est.
Brice Clotaire Oligui Nguema parviendra-t-il à moderniser la capitale, quitte à raser des dizaines de bidonvilles, dans un pays où l’immobilisme et l’attentisme sont souvent la norme ? L’avenir de Libreville est en marche, mais non sans défis.