Des documents internes consultés par Africa Intelligence révèlent l’ampleur de la déroute. À la fin de 2023, la trésorerie du FGIS ne représentait qu’environ 10 % du capital initial, soit environ 20 milliards de FCFA. Bien que la valeur des actifs soit estimée à 343 milliards de FCFA, une part substantielle de 142 milliards de FCFA est considérée comme totalement ou partiellement dépréciée, attestant de choix d’investissements calamiteux.
L’ère de la gestion opaque
L’essentiel des investissements, soit plus de 80 %, a été réalisé sous la direction de Serge Thierry Mickoto Chavagne, qui a régné sur le FGIS de 2012 à 2019. Proche de l’ancien exécutif, sa gestion, sous la tutelle directe du Palais du Bord de mer, fut caractérisée par une opacité troublante, loin des standards internationaux. Des audits effectués des années plus tard tentent de reconstituer partiellement le puzzle, faute d’archives et de bilans comptables clairs depuis 2016.
Plusieurs projets se sont soldés par des échecs cuisants. Le programme satellitaire Earthlab, destiné à la surveillance forestière, a coûté 2,2 milliards de FCFA avant d’être rapidement abandonné en 2017 en raison des coûts de traitement d’images jugés démesurés.
L’investissement dans Tropical Holding (pisciculture) s’est soldé par une perte de 1,6 milliard de FCFA suite à un détournement de fonds. De même, la liquidation de la Banque Gabonaise de Développement et l’arrêt du Comptoir gabonais de collecte de l’or ont engendré des pertes avoisinant 6,5 milliards de FCFA. Même les associations avec l’homme d’affaires franco-marocain Yariv Elbaz via les structures Agriland et InfraPPP, pour un investissement de près de 5 milliards de FCFA, n’ont débouché sur aucun projet et ces entreprises ont été liquidées.
Une quête désespérée de liquidités
L’arrivée d’une nouvelle direction en 2020 a tenté de réorienter la gouvernance, mais elle s’est immédiatement heurtée à une crise de liquidité profonde. Alors que seulement 13 milliards de FCFA de liquidités restaient disponibles, l’État a procédé en 2020 à une ponction illégale de 54 milliards de FCFA sur les fonds du FSRG pour boucler son budget post-Covid, violant un décret interdisant de puiser dans le fonds tant que son capital n’atteint pas 500 milliards de FCFA.
Après d’intenses négociations, le FGIS a obtenu un dédommagement sous forme de participations dans des entreprises publiques (telles que Gabon Telecom ou la Bicig), valorisées à 43,5 milliards de FCFA, offrant un fragile répit.
Sous la menace du défaut de paiement
Depuis la transition, le FGIS a perdu en influence et en indépendance, sa tutelle étant passée au ministère de l’Économie. L’instabilité est marquée par une valse de dirigeants, et le conseil d’administration a perdu tout pouvoir réel.
Aujourd’hui, l’emprise du ministre de l’Économie, Henri-Claude Oyima, se renforce. Il a notamment exigé que les dividendes de certaines filiales soient versés directement au Trésor public. Cette directive est critique pour l’avenir immédiat du FSRG, qui doit honorer au moins 27 milliards de FCFA d’engagements bancaires, dont 12 milliards de FCFA avant la fin de l’année.
Ces contraintes financières placent le Fonds Souverain sous la menace directe d’un défaut de paiement, scellant un échec cuisant de la stratégie nationale de diversification économique.
			








