Une justice à géométrie variable ?
L’arbitrage rendu le 6 septembre est édifiant. D’un côté, les candidatures du parti Réappropriation du Gabon, de son Indépendance, pour sa Reconstruction (REAGIR) ont été invalidées, notamment celles de la faction du ministre François Ndong Obiang. La raison invoquée est un conflit de leadership, le parti étant déchiré entre cette faction et celle de Michel Ongoundou Loundah. Cette décision, bien que juridiquement fondée sur le principe de bicéphalisme, détonne lorsque l’on observe la situation de l’ancien parti au pouvoir, le Parti Démocratique Gabonais (PDG).
Depuis la chute du régime d’Ali Bongo, le PDG est lui aussi traversé par des divisions profondes, avec une faction fidèle au nouveau pouvoir dirigée par Blaise Louembé et Angélique Ngoma, et une autre, menée par Ali Akbar Onanga Y’Obegue, restée loyale à l’ancien “Distingué camarade président”. Or, malgré ce conflit interne, les candidatures du PDG ont été validées sans encombre.
Le cas des “transfuges” et le silence de la Cour
Le code électoral impose un délai de quatre mois entre la démission d’un parti et une nouvelle candidature. Pourtant, un grand nombre de candidats de la nouvelle formation présidentielle, l’Union Démocratique des Bâtisseurs (UDB), sont d’anciens membres du PDG n’ayant pas respecté ce délai. Leurs candidatures auraient dû être déclarées irrecevables.
Pourtant, la Cour a validé l’intégralité des candidatures des transfuges du PDG pour l’UDB. Un fait notable est que le PDG avait initialement déposé un recours en ce sens, mais l’a mystérieusement retiré à la demande de son président, Blaise Louembé. Ce retrait soulève une question fondamentale : une requête qui touche à l’intégrité du processus électoral peut-elle être annulée par une simple lettre, contournant ainsi les principes de la justice ?
Une crédibilité en jeu
La légitimité des prochaines élections est étroitement liée à la crédibilité de la Cour constitutionnelle. Pourquoi la même juridiction peut-elle invalider les candidatures d’un parti tout en validant celles d’un autre, alors que les griefs sont similaires ? Comment justifier la validation de candidatures qui semblent violer la loi électorale de manière si flagrante ? Ces questions, encore sans réponse, jettent un voile de suspicion sur l’indépendance de la plus haute juridiction du pays.