Incohérence sur la qualification juridique des faits
La critique principale du Dr. Aubiang Nzeh porte sur le choix des fondements légaux pour qualifier les faits. Le procureur, écartant le délit de presse, a invoqué l’article 301 du Code pénal (relatif à la corruption) et l’article 254 du Code des marchés publics.
L’analyste juridique rétorque que ces textes sont mal ciblés. L’article 254 du Code des marchés publics vise en effet les ordonnateurs publics ou agents chargés de la commande publique, et non les prestataires privés. Le Dr. Aubiang Nzeh souligne ainsi que Harold Leckat, n’étant pas un agent public, les textes cités ne peuvent lui être appliqués pour incriminer une violation de la procédure de passation des marchés.
Confusion entre contractant privé et gestionnaire de fonds publics
Le Dr. Aubiang Nzeh dénonce également une confusion majeure dans l’approche du parquet, qui évoque des « détournements de fonds publics ».
« Un prestataire privé ne peut détourner des fonds qu’il ne gère pas », rappelle l’analyste. Il soutient que la CDC, en tant qu’Établissement Public à Caractère Industriel et Commercial (EPIC), est la seule ordonnatrice et comptable de ses dépenses. La responsabilité du prestataire se limite strictement à l’exécution du contrat. En conséquence, seule la CDC pourrait être poursuivie pour une éventuelle irrégularité budgétaire liée à la passation.
Vice de procédure dans l’instruction et mesure coercitive disproportionnée
Le recours à la garde à vue par la Direction Générale des Recherches (DGR) pour un différend jugé de nature économique et contractuelle est vivement critiqué. Selon les articles 48 et suivants du Code de procédure pénale gabonais, cette mesure est strictement encadrée.
Le Dr. Aubiang Nzeh estime que cette mesure coercitive est disproportionnée et juridiquement discutable dans ce contexte commercial. Il insiste sur le fait que le parquet aurait dû privilégier un audit ou une expertise comptable pour établir les faits avant toute décision d’arrestation.
Contradiction et instrumentalisation du secret de l’instruction
Enfin, une contradiction flagrante dans la communication du procureur est relevée. Tout en invoquant le secret de l’instruction (article 4 du CPP), le procureur en a détaillé publiquement des éléments clés (chefs d’accusation, inculpation, détention).
Le Dr. Aubiang Nzeh y voit une « instrumentalisation médiatique » d’une procédure qui se doit de rester confidentielle. Le fait de dévoiler des éléments du dossier au public est perçu comme une violation de facto du principe de confidentialité que le parquet était censé garantir.