Le projet de décret présidentiel, bien que démenti par certains acteurs, dessine une nouvelle carte stratégique mondiale pour les États-Unis, où l’Afrique ne figurerait plus parmi les priorités. Concentrant ses ressources sur l’Eurasie, le Moyen-Orient, l’Amérique latine et l’Asie-Pacifique, Washington envisagerait la fermeture des ambassades et consulats jugés “non essentiels” en Afrique subsaharienne : Libreville verra-t-elle le rideau tomber sur sa mission diplomatique américaine ?
Au-delà de cette menace de fermeture, le projet évoque une refonte structurelle profonde, avec la possible suppression du bureau Afrique du Département d’État au profit d’un “bureau de l’envoyé spécial pour les affaires africaines” placé sous la tutelle directe du Conseil national de sécurité interne de la Maison Blanche. Ce recentrage du pouvoir décisionnel augurerait d’une approche potentiellement plus sécuritaire et moins axée sur le développement pour les relations américano-africaines.
Pour le Gabon, les conséquences d’un tel retrait pourraient être considérables. Alors que le pays misait sur un engagement américain accru pour soutenir sa transition et ses objectifs de développement durable, notamment dans les secteurs clés de l’économie, de l’environnement et de la sécurité, l’avenir des promesses de coopération apparaît désormais des plus flous. Le financement pour la conservation marine et le terminal minéralier d’Owendo seront-ils maintenus ? L’appui crucial à l’Agence nationale des parcs nationaux (ANPN), qui devait bénéficier d’un investissement total de 22 millions de dollars, sera-t-il remis en question ?
La suspension des programmes de l’USAID avait déjà eu un impact concret, privant notamment le Gabon de la formation d’observateurs électoraux pour la présidentielle du 12 avril, un engagement pourtant pris par Washington.
Si les annonces initiales laissaient entrevoir un partenariat florissant, la possible révision stratégique américaine fait planer une menace tangible sur la pérennité des engagements pris. La Société de financement du développement international (DFC) avait manifesté un intérêt marqué en prévoyant de mobiliser 500 millions de dollars pour des projets structurants, tandis que les services américains dédiés à la faune s’étaient engagés à hauteur de 22 millions de dollars pour l’ANPN. Ces promesses, représentant un investissement total de 522 millions de dollars, soit environ 326 milliards de francs CFA, pourraient-elles rester lettre morte face à une redéfinition des priorités américaines ? Seul l’avenir apportera une réponse définitive à cette question cruciale pour l’avenir des relations bilatérales.